Déclaration liminaire de SUD éducation et SUD Recherche EPST au CTMESR du 12 janvier 2022

vendredi 14 janvier 2022
par  Sud éduc 34

Déclaration de SUD éducation
Vendredi 14 janvier 2022

Ci-dessous les principales expressions de Sud éducation et Sud Recherche EPST au CTMESR du 12 janvier : une déclaration liminaire à propos de la situation sanitaire et de l’appel interprofessionnel du 27 janvier et une expression spécifique sur les lignes directrices de gestion du Ripec à l’ordre du jour de ce CT.

Déclaration liminaire de Sud éducation et Sud Recherche EPST

Mercredi 29 décembre, à 3 jours de la reprise et du début de très nombreux examens, la Ministre Frédérique Vidal s’est enfin exprimée par voie de presse, pour affirmer que les examens prévus la rentrée se dérouleraient bien en présentiel.

Maintenir les examens en présentiel, c’est prendre le risque qu’un nombre élevé d’étudiant-e-s se sont présenté-e-s ou se présenteront aux examens tout en étant cas contact, en s’ignorant positif voire même en se sachant positif. Cette mesure va à l’encontre des impératifs de santé publique dans la période, alors que c’est sur la tranche d’âge des 20-29 ans que le taux d’incidence de l’épidémie de Covid-19 est à l’heure actuelle le plus élevé en France.

Pour le Ministère, il n’est toujours pas question ni de modifier le calendrier universitaire, ni d’accorder aux établissements les moyens d’accueillir les étudiant-e-s et le personnel dans des conditions sanitaires satisfaisantes : l’enjeu est simplement que les universités continuent à produire des diplômé-e-s, peu importe dans quelles conditions. Sans moyens supplémentaires de lutte contre la propagation du virus, ce simulacre de normalité constitue une source d’inquiétude et de stress accrue pour le personnel contraint de venir assurer la rentrée ou surveiller les examens. Elle risque également de mettre en danger le personnel, les étudiantes et étudiants ainsi que le reste de la société, c’est-à-dire nos familles, voisin-e-s et ami-e-s.
Pour toutes les catégories de personnel, cette décision est lourde de conséquences. Les enseignantes et enseignants risquent de devoir produire de très nombreux sujets de substitution pour les étudiantes et étudiants empêché-e-s ; ces heures de travail supplémentaires seront-elles rémunérées, sur quel budget ?

Cette décision est aussi en contradiction avec la décision de la ministre de la Fonction Publique Amélie de Montchalin qui impose par une circulaire en date du 29/12 un minimum de trois jours de télétravail pour les agentes et agents de la Fonction publique. Dès lors, il semble impossible d’assurer l’organisation d’examens en présentiel tout en assurant au personnel BIATSS en particulier le droit à au moins 3 de télétravail par semaine. Il est à craindre que les responsables de service pèsent de tout leur poids pour empêcher les collègues de faire valoir leurs droits, dans une situation sanitaire pourtant extrêmement dégradée.
Dans une circulaire publiée ce même 29 décembre, la DGESIP dédouane le Ministère de ses responsabilités en renvoyant aux établissements le soin d’organiser les examens sans moyens supplémentaires. Elle confirme également que la règle, en cette rentrée de janvier 2022, sera celle de la « continuité pédagogique en présentiel ». A l’instar de la « continuité pédagogique en distanciel » subie ces deux dernières années, le Ministère démontre qu’il ne se soucie nullement ni de la santé des étudiantes et des étudiants et du personnel, ni de la qualité de la formation et des conditions dans lesquelles elle est délivrée.

Dans les laboratoires la mise en œuvre des jours de télétravail obligatoires se fait de manière tout à fait aléatoire, chacun interprétant la circulaire à sa manière ; elle se fait aussi bien trop souvent sans organisation collective, avec d’un côté le personnel technique, les doctorantes et les doctorants, les stagiaires qui sont tenu-es de venir sur site, en étant parfois isolé-es, alors que les encadrantes et encadrants sont en télétravail ; ce qui n’est pas sans poser problème en terme de risques.

Cela fait pourtant deux ans que l’épidémie de Covid-19 revient inlassablement et que les établissements du service public d’enseignement supérieur et de recherche subissent les effets des changements d’humeur et des revirements de doctrine au sommet de l’État. Deux ans, et toujours aucune mesure d’ampleur n’a été prise pour garantir des conditions satisfaisantes pour l’accomplissement des activités d’enseignement et de recherche. Deux ans d’annonces ministérielles et de circulaires de dernière minute qui court-circuitent les instances de représentation du personnel, les CHSCT étant trop souvent mis devant le fait accompli d’ajustements précipités. Dans la période il est pourtant urgent de les concerter pour établir des plans de continuité. Où est le « dialogue social nourri » dont parle Mme de Montchalin dans sa circulaire ?

SUD éducation et SUD recherche EPST continuent de revendiquer :
• de manière immédiate :
- la mise à disposition de masques FFP2 pour l’ensemble du personnel et des usagers et usagères, sans restriction
- l’installation de capteurs de CO2 et de purificateurs d’air, ainsi qu’un plan d’urgence d’installation et de mise à niveau des ventilations dans les bâtiments de l’ESR
- des tests massifs et réguliers ou la mise à disposition d’autotests pour l’ensemble du personnel et des usager-e-s, sans restriction
- des protocoles sanitaires lisibles qui dépendent d’indicateurs sanitaires clairs au lieu du bon vouloir ministériel, avec des annonces précoces qui permettent aux personnels d’anticiper les changements nécessaires
• plus largement : un plan de recrutement massif de personnel à tous les niveaux (personnels administratif et technique, enseignantes, enseignants, chercheurs et chercheuses) et une augmentation conséquente du budget pour le MESRI afin de rattraper des années de retard et faire face à la crise qui a déjà fait trop de dégâts dans l’ESR ; bref, un véritable plan d’urgence pour l’ESR qui allie les volets sanitaire, budgétaire - avec des emplois statutaires - pédagogique et social afin de tout mettre en œuvre pour maintenir les universités et les EPST ouverts tout en assurant la sécurité du personnel et des étudiantes et étudiants.

Enfin puisque l’un des points principaux de ce CTMESR aborde la question des rémunérations de certaines catégories de personnel, nous ne pouvons passer sous silence le fait que le 27 janvier, SUD éducation et SUD Recherche EPST, avec notre Union Syndicale Solidaires, ainsi que d’autres syndicats, appellent les collègues à participer à la grève interprofessionnelle et intersyndicale pour l’augmentation des salaires, des pensions et des minimas sociaux.
Dans notre secteur, les raisons d’être en grève sont nombreuses : salaires des catégories C. notamment encore bien trop bas au regard de l’inflation et de l’augmentation des dépenses courantes, inégalités femmes/hommes, un système universitaire qui tient sur la précarité d’une grande partie de ses personnels...

Le ministère a profité de la crise sanitaire pour faire passer en force la Loi de programmation de la recherche (LPR) et ses décrets d’application. À travers les opérations de repyramidage (avancement dans le grade supérieur) destinées à une minorité de collègues de la filière ITRF et de MCF, ainsi que du RIPEC celui-ci mise sur les primes et des promotions accordées à quelques titulaires, pour ne pas s’engager dans une revalorisation salariale.

Le repyramidage de la filière ITRF n’aura qu’un effet modéré de résorption de la pauvreté, passant à côté d’un plan plus ambitieux s’adressant à l’ensemble des collègues de catégorie C, cependant que la massification du recours aux contrats précaires prévue par la loi de transformation de la fonction publique et la LPR condamnent les nouvelles générations de personnel de la recherche et de l’enseignement supérieur à une précarité sans fin.
Les personnels de l’ESR, comme les étudiantes et étudiants, sont épuisé-e-s de ces 2 dernières années de crise sanitaire et sa gestion irresponsable par le ministère.

Nous l’avons dit, il est plus qu’urgent que le gouvernement enclenche un véritable plan d’urgence pour l’ESR. Comme dans le reste de la FP d’ailleurs, l’État ne peut continuer à bloquer les salaires et précariser son personnel tout en menant parallèlement une politique fiscale au profit des plus riches et du patronat.

Nous serons dans la rue le 27 janvier pour réclamer :
- un SMIC à 1 700 euros net
- des augmentations de salaires, pensions, minima sociaux de 400 euros
- la fin des régimes indemnitaires RIFSEEP et RIPEC et l’intégration des primes au salaire
Et pour en finir avec les inégalités entre les femmes et les hommes : à travail égal, salaire égal.

Déclaration Sud éducation – Sud Recherche EPST sur les LDG du Ripec

Après la soumission du décret relatif au RIPEC au CTMESR du 7 juin, c’est aujourd’hui la déclinaison de ce RIPEC sous la forme de lignes directrices de gestion (LDG) ministérielles qui nous est proposée pour avis.

Ces LDG confirment les enjeux et les objectifs de ce RIPEC, à commencer par la mystification concernant les rémunérations des EC et des Ch liée au versement mensuel de la composante statutaire (C1) de ce nouveau régime indemnitaire : en venant s’ajouter mensuellement au traitement des EC et Ch titulaires, le RIPEC vient masquer la stagnation des salaires (et donc leur baisse réelle dans un contexte d’inflation) dans notre secteur et se révèle en tant que simple palliatif, par ailleurs largement inadéquat.

Surtout, ces LDG accordent une marge de manœuvre très significative aux directions d’établissement pour ce qui est des composantes fonctionnelle (C2) et individuelle (C3) du RIPEC. Pour les universités, elles viennent conforter la présidentialisation de la gouvernance introduite par la loi LRU de 2007. D’emblée, il est indiqué dans ces LDG ministérielles, qu’elles ont vocation à être « complétées par des critères locaux traduisant la politique indemnitaire de l’établissement. ». Il est précisé qu’il « appartiendra à chaque chef d’établissement d’établir ces priorités et ces critères, tant pour répartir la composante fonctionnelle du nouveau régime indemnitaire que pour attribuer la prime individuelle. »

Pour ce qui est de la composante fonctionnelle, si son montant est bien « plafonné par arrêté ministériel par groupes de fonctions ou de niveaux de responsabilité », il est aussi précisé que le périmètre exact des « fonctions et responsabilités concernées sont déterminées par décision du chef d’établissement conformément aux principes de répartition des primes définis par le conseil d’administration et aux lignes directrices de gestion de l’établissement. » Les LDG se contentent de recommander de « limiter la dépense au titre de la composante fonctionnelle entre 20 et 30 % » et de « limiter le nombre de bénéficiaires de la composante fonctionnelle à 25% - devenus 35% suite aux amendements - des effectifs » d’EC et de Ch. Dans ces conditions, il est entièrement possible pour les directions d’établissement de passer outre ces recommandations, déjà très généreuses à l’égard des personnes placées en position de responsabilité, pour créer un système clientéliste plus élargi encore.

Pour la prime individuelle, il est même recommandé aux EPST comme aux universités d’en faire une utilisation intensive, les LDG encourageant les établissements à « assurer une dépense au titre de la prime individuelle d’au moins à 30% de la dépense faite au titre de la composante statutaire ». Et même s’il est recommandé d’augmenter le nombre de bénéficiaires de cette prime individuelle de telle sorte qu’à terme elle soit servie à 45% des effectifs, cela revient de fait à en exclure 55%. Pour ce qui est de la procédure d’attribution de cette prime « liée à la qualité des activités et à l’engagement professionnel », le détail diffère entre les EPST et les universités, mais la logique reste la même : l’examen des dossiers par des instances d’évaluation (CAC et CNU pour les universitaires, instance d’évaluation compétente ou comité ad’hoc pour les chercheurs et chercheuses) a pour fonction d’éclairer la décision d’attribution de cette prime C3, décision qui revient au final à l’exécutif de l’organisme pour les EPST et au chef d’établissement pour les universités. Et l’arbitraire de la décision est renforcé par la liberté laissée aux établissements d’ajouter leurs propres critères, le Ministère donnant comme exemples de critères « l’engagement dans les appels d’offres européens, la recherche partenariale, la participation aux projets de site, la coopération internationale » pour les EC et les Ch, ou encore « l’innovation pédagogique » pour les EC. Ces critères supplémentaires sont autant de motifs que la direction de l’établissement pourra invoquer pour justifier le fait du prince.

Comme on pouvait donc s’y attendre, parce que tout système de prime individualisé y mène et parce que le RIFSEEP en est déjà l’illustration quotidienne, le RIPEC est donc un nouvel outil mis au service des politiques clientélistes de directions d’établissement et de la re-féodalisation de l’enseignement supérieur et de la recherche engagé depuis la LRU. Individualisation, fragmentation des corps des EC et des Ch, soumission aux potentats locaux et à la logique de concurrence introduite par les appels à projet : c’est bien une laisse - quoiqu’une laisse dorée quand on considère les montants qu’empocheront quelques privilégié-e-s - que le Ministère propose aux EC et aux Ch de se mettre autour du cou. Une laisse dorée au goût amer quand on se souvient qu’il s’agit prétendument de la contrepartie de la LPR, c’est à dire de la précarité généralisée et sans issue promise aux nouvelles générations de jeunes chercheurs et jeunes chercheuses.

Pour notre part, c’est NON et ce sera toujours NON. Notre revendication demeure l’égalité ; rien de plus ; rien de moins.

Disons quelques mots toutefois du détail des trois composantes du RIPEC. Soulignons d’abord que la composante statutaire (C1) est appelée à remplacer en 2022 les actuelles prime de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) attribuée aux EC et prime de recherche (PR) attribuée aux Ch. S’il s’agit donc bien d’une augmentation du régime indemnitaire pour l’ensemble des EC et Ch titulaires, il faut se garder de l’additionner aux primes fixes existantes. Le montant annuel de cette nouvelle prime de base devrait atteindre 6400€ en 2027, à condition bien entendu que les moyens soient effectivement donnés dans le cadre des lois de finance qui vont se succéder d’ici là. De manière plus précise, le protocole dit ceci : « la part liée au grade augmentera de 17,7 M€ à 104 M€ en 2027. Cette augmentation de 86,3 M€ permettra de passer l’actuelle prime de recherche (PR) de 990€ à 6400€ en 2027. » Comme nous l’avons déjà souligné, une ne simple règle de trois montre que même dans le protocole le compte n’y est pas, à moins d’acter au passage la perte de 10% des effectifs de chercheuses et de chercheurs d’ici 2027 ! On soulignera aussi la largesse du Ministère à l’égard des EC et Ch mis à disposition pour création d’entreprise, qui continueront de percevoir cette prime.

Concernant la composante fonctionnelle (C2), on a déjà souligné la grande liberté laissée aux chefs d’établissement de déterminer les fonctions et responsabilités concernées. Remarquons aussi qu’il est possible d’« indemniser l’exercice d’une mission confiée par le chef d’établissement pour une durée maximale de dix-huit mois. Le versement de la prime est alors conditionné à une évaluation des résultats de la mission au regard des objectifs fixés par une lettre de mission établie par le chef d’établissement. » Le chef d’établissement pourra donc librement créer des sinécures et en décider de la bonne occupation par ses courtisans ou courtisanes. Les président-e-s d’université devraient d’ailleurs bénéficier très largement des largesses du RIPEC : autant les indemnités fonctionnelles existantes (PCA, PRP et IFSIC) seront remplacées courant 2022 par le RIPEC, autant la très généreuse prime administrative (PA) touchée par les président-e-s d’université sera cumulable avec le RIPEC.

Pour finir, la prime individuelle « est amenée à remplacer au 1er janvier 2022 la prime d’encadrement doctoral et de recherche (PEDR) ». Que les plus excellent-e-s de nos collègues se rassurent : « la PEDR perdurera pour les personnels « apportant une contribution exceptionnelle à la recherche » ou pour les lauréats de certaines distinctions honorifiques (3ème et 4ème alinéas de l’article 1er du décret du 8 juillet 2009), ainsi que pour les enseignants-chercheurs placés en délégation auprès de l’IUF. » C’est donc bien d’un redoublement des inégalités existantes qu’il s’agit, et non pas de leur amendement.
Ce que le RIPEC promet, c’est donc l’explosion des inégalités au sein des corps d’EC et de Ch dès 2022, entre l’immense majorité qui plafonnera à 2800€ de primes (la C1 revalorisée) et une minorité de privilégié-e-s qui pourra cumuler jusqu’à 30000€ de primes supplémentaires. Oui, cela correspond à l’équivalent de 2 SMIC annuels qui bénéficieront aux plus privilégié-e-s des titulaires.

Enfin contrairement à ce que promettent ces LDG, le RIPEC va augmenter les aussi les inégalités femmes-hommes, comme tout régime indemnitaire qui individualise les rémunérations. Une prime qui se limiterait à un seul C1 d’un montant unique et uniforme résoudrait pourtant aisément cette question.

Au rebours du RIPEC, pour SUD éducation et SUD Recherche EPST, les priorités en termes d’emploi et de carrières sont la résorption de la pauvreté qui touche les corps au bas de l’échelle des rémunérations, et la résorption de la précarité qui affecte notre secteur plus que tout autre dans la fonction publique.
Nous voterons donc contre ce texte.

Déclaration liminaire de SUD éducation et SUD Recherche EPST au CTMESR du 12 janvier 2022