Depuis plusieurs années les élèves de troisième des établissements de l’académie de Montpellier participent à des « Forums de l’orientation » organisés dans les lycées par la Fondation Agir Contre l’Exclusion (F.A.C.E.) - Club d’entreprises, avec la bénédiction du rectorat. Le but affiché est d’aider les élèves à construire leur projet d’orientation. Si cet objectif est noble les moyens utilisés posent problème. En effet, il est intéressant de se pencher sur ce qu’est réellement la fondation F.A.C.E.

Cet organisme regroupe des fondations d’entreprises qui prétendent ainsi « avoir un rôle social ». Il faut savoir que cela permet avant tout aux dites entreprises de bénéficier de déductions fiscales et de fonds publics pour financer leurs actions et redorer leur blason à peu de frais. Autrement dit cette « fondation » est un lobby patronal dans lequel on retrouve des multinationales du CAC40 par exemple Bouygues construction, AG2R, Groupama, Orange, GDF-Suez, les assurances AXA, Veolia, ou encore EDF.

Ces entreprises du CAC40, dont les bénéfices ont explosé de 20 % en 2015 selon le journal Les Échos, se retrouvent donc à intervenir sur du temps scolaire. Alors que dans le même temps, l’éducation est sacrifiée sur l’autel de l’austérité et que plus d’un million de personnes sont passées sous le seuil de pauvreté entre 2004 et 2014. Les entreprises multinationales qui entrent maintenant dans l’école sous prétexte de faire du social sont précisément les plus grands adversaires de l’école publique et de l’égalité sociale. Elles sont responsables par leurs politiques (licenciements, délocalisations...) de l’explosion de la pauvreté et de l’exploitation des travailleurs.
De plus il est évident que l’idéologie transmise par cette fondation est non-neutre : mise en avant des valeurs du marché et du libéralisme économique, du management, de la soumission à l’autorité, de l’amour de l’entreprise... Rien que de la communication managériale en somme pour convaincre que l’entreprise est un monde magique : rien sur la réalité du monde du travail, sur les rapports de hiérarchie, sur les droits des travailleurs... bien évidemment.

Au delà de l’idéologie dispensée, l’intervention d’un lobby patronal comme le Club d’entreprises F.A.C.E. au sein des établissements scolaires n’est pas anecdotique.
C’est un des éléments de la privatisation rampante de l’Éducation Nationale. Il n’est d’ailleurs pas inutile de relever de le président national de cette noble et généreuse fondation est Monsieur Gérard MESTRALLET. Ancien énarque, PDG de GDF-Suez de 2008 à 2016 (période durant laquelle il a touché une rémunération moyenne annuelle de 2 500 000€ plus une retraite chapeau de 21 millions d’euros à son départ de GDF-Suez en 2014), Monsieur MESTRALLET a été l’artisan de la privatisation de Gaz de France. Avec les magnifiques résultats que l’on connaît : augmentation des factures pour les usagers, évasion fiscale, souffrance des salariés au travail... Serait ce un hasard de retrouver maintenant ce monsieur à l’œuvre dans le monde de l’éducation ?

L’incursion de cette fondation, sous des abords sympathiques et bienveillants, permet bien aux entreprises multinationales d’entrer dans l’école, de distiller leur idéologie aux élèves captifs, sur du temps scolaire, et c’est inadmissible. On nous rétorquera que c’est gratuit, qu’on a pas les moyens au sein de l’Éducation Nationale... C’est justement le problème. Qui sont les intervenants qui conseillent les élèves lors de ces rencontres organisées par F.A.C.E. ? Sont-ils formés ? Compétents ? Comment sont-ils choisis ?

Il existe des personnels formés et compétents dans l’Éducation Nationale : les Conseillers d’Orientation Psychologues (CO-Psy), malheureusement, ils sont trop peu nombreux.
C’est pourquoi Sud éducation exige le recrutement de CO-Psy à hauteur des besoins et la fin de la collaboration entre l’Éducation Nationale et le lobby patronal F.A.C.E. - Club d’entreprises.
Nous appelons tous les personnels mais aussi les parents à être vigilants et à s’opposer, dans l’intérêt des élèves, à la privatisation du service public d’Éducation Nationale sous toutes ses formes... même quand elle paraît souriante.