Mutations INTRA 2019, arrangements et passe-droits : « L’amour est dans la mut’ »

jeudi 11 juillet 2019
par  Sud éduc 34

Chaque année a lieu le mouvement INTRA académique des certifiés et agrégés. De nombreux collègues attendent avec impatience les résultats qui tombent fin juin. En effet la politique de l’emploi menée par le ministère entraîne une pénurie de postes… et donc un blocage du mouvement ! Certains enseignants patientent pendant des années avant d’avoir le barème suffisant pour obtenir une mutation qui conditionne l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail. En attendant ils sont conduits à travailler dans des conditions difficiles : éloignement du domicile, trajets fatigants et onéreux, indisponibilité pour la vie de famille…

C’est ce que nous dénoncions déjà dans notre déclaration liminaire en ouverture de la FPMA, intitulée « INTRA 2019 : Encore un mouvement bloqué ! » en présence de madame la Rectrice. Vous pouvez la trouver ici.
De manière générale, si vous voulez obtenir l’affectation de vos rêves, nous avons la meilleure solution pour vous : épousez un personnel dans la hiérarchie de l’Éducation Nationale !

La révision d’affectation, qu’est ce que c’est ?


Pour celles et ceux qui n’obtiendraient pas satisfaction il existe une procédure à l’issue du mouvement : la révision d’affectation.
Obtenir une révision d’affectation permet aux personnels d’être nommés sur un support provisoire (BMP), plus proches de chez eux.

La procédure de révision d’affectation est pourtant censée être encadrée par des règles très restrictives. Celles-ci sont définies par arrêté rectoral (Article 6 de l’arrêté rectoral).
Extrait : « Les demandes de révision d’affectation ne seront prises en compte que dans les huit jours suivant la publication des résultats du mouvement et exclusivement pour les motifs suivants :
- Décès du conjoint ou d’un enfant,
- Cas médical aggravé d’un des enfants, du conjoint ou de l’agent,
- Perte d’emploi du conjoint,
- Mutation du conjoint dans le cadre d’un autre mouvement de personnels du ministère de l’éducation nationale,
- Mutation imprévisible et imposée du conjoint. »

Les demandes sont ensuite examinées en Commission de révision d’affectation où siègent les élus du personnel. En théorie, la révision d’affectation est accordée à tout personnel entrant dans le périmètre de l’arrêté rectoral. Traditionnellement les demandes formulées pour des raisons familiales mais n’entrant pas dans le cadre de l’arrêté rectoral, et ne reposant sur aucun élément médical jugé probant par le Médecin Conseiller Technique du Rectorat ont toujours été refusées par l’administration. Celle-ci affirmant que la situation familiale est déjà prise en compte lors du mouvement par l’attribution de bonifications (rapprochement de conjoint, enfants…).

2017 : déjà des irrégularités chez les certifiés / agrégés

A l’issue du mouvement 2017, nous étions intervenus en commission de révision d’affectation certifiés/agrégés sur une situation qui posait problème : alors que l’administration refusait toutes les demandes revêtant un caractère familial, nous avons constaté qu’elle accordait depuis plusieurs années une révision d’affectation à une collègue pour des raisons familiales n’entrant pas dans le cadre de l’arrêté rectoral. Cette collègue avait néanmoins l’avantage d’être mariée à un chef d’établissement, ce qui lui permettait, depuis plusieurs années, d’effectuer son service à Montpellier en lycée, plutôt qu’a Béziers en collège REP+. Devant l’inégalité de traitement flagrante et la levée de boucliers en commission l’administration avait officiellement annoncé que cette collègue ne bénéficierait pas d’une révision d’affectation.

Néanmoins quelle ne fut pas notre surprise de constater à la rentrée 2017, que l’administration, faisant fit de l’avis de la Commission, avait à nouveau affecté cette collègue en lycée… à Montpellier !

2018... Du grand n’importe quoi, opacité et passe-droits


A l’issue du mouvement 2018, nous avons fait un rappel du cadre légal de la révision d’affectation en début de la commission de révision d’affectation. Nous avons rappelé que l’égalité de traitement entre les fonctionnaires était une obligation légale de l’administration.

L’administration s’est donc retrouvée dans une situation intenable ne pouvant ouvertement assumer l’inégalité de traitement entre personnels. La commission de révision d’affectation des certifiés et agrégés s’est donc déroulée dans des conditions ubuesques : hormis les personnels entrant strictement dans le cadre de la révision d’affectation tous les autres ont reçu un avis conditionnel, « oui si... ». La décision d’affectation à titre provisoire étant renvoyée à la Commission AJUAFA (commission paritaire qui affecte les TZR et les personnes en révision d’affectation) des 9 et 10 juillet.
Cette commission AJUAFA a été le point culminant du grand n’importe quoi administratif et de l’injustice :
- Certains personnels ont bénéficié de révisions d’affectation et d’autres non pour des situations similaires.
- L’administration a refusé en commission la révision d’affectation d’un collègue qui entrait strictement dans le champ d’application de l’arrêté rectoral (éléments médicaux et avis du médecin du rectorat à l’appui).
- Au moins quatre collègues ont bénéficié de révisions d’affectation sur « décision RH » (ressources humaines). La hiérarchie a refusé de donner les éléments objectifs justifiant ses décisions. Cependant nous notons que ces collègues sont tous conjoints de personnes exerçant à un degré hiérarchique élevé dans l’administration. Aucun ne rentre strictement dans le cadre de l’arrêté rectoral.

2019... Toujours plus loin dans l’inégalité de traitement

Cette année, l’administration a continué de traiter les différentes situations en AJUAFA de manière diamétralement opposée. Voici un florilège des situations que nous avons dénoncées en séance mais qui ont été entérinées par les services du rectorat :

- Un collègue, 1er au barème sur sa Zone de Remplacement (ZR) avec plus de 1000 points, dans une discipline très peu fournie en postes (1 seul BMP de 18h dans la zone), n’avait pas les faveurs de son IPR. Ainsi, c’est un autre collègue, qui avait 800 points de moins que lui, qui a obtenu le poste.

- Dans une autre discipline, une collègue n’a pas été affectée sur son 1er vœu alors qu’il y avait suffisamment d’heures et qu’elle était pourtant 1ère au barème sur ce poste. La raison : l’inspection considère qu’elle serait mieux ailleurs...

- À l’inverse, d’autres collègues sont placés sous une meilleure étoile ! C’est le cas d’une collègue qui n’avait pas fait de demande de mutation dans le cadre du mouvement INTRA, ni de demande de révision d’affectation. L’administration nous informe que nous devons absolument traiter sa demande : c’est une femme de chef d’établissement... Elle obtiendra finalement le poste dans un établissement qu’une TZR (pourtant première au barème) occupait depuis plusieurs années.
Réponse de l’IPR de discipline : « Les insinuations de SUD éducation sont insupportables, chef d’établissement est un travail très difficile, en plus on ne choisit pas sa mobilité ! » On notera que selon cet inspecteur le travail d’enseignant est donc facile, et que l’on obtient tout à fait la mobilité que l’on choisit !

- Dans le même registre, une autre collègue conjointe de chef d’établissement, avec une demande non recevable au titre de l’article 6 de l’arrêté rectoral, a également obtenu une révision d’affectation prioritaire sur une zone plus proche de son domicile, en étant affectée sur un bout de BMP, alors même que cela a été refusé à des dizaines de TZR par ailleurs...

- Nous pourrions aussi évoquer le cas d’un collègue, élu au conseil municipal de sa ville, qui a été affecté sur un BMP correspondant à la moitié de son obligation de service, alors que cela a été refusé à des dizaines de TZR pour qui l’administration ne voulait pas qu’ils soient trop en sous-service !

2020... La disparition pure et simple des CAPA

Actuellement tout ce qui concerne la carrière des titulaires (mutations, sanctions, avancement...) est examiné par des commissions paritaires : la moitié des sièges est occupée par des représentant-e-s des personnels. C’est ce qui évite les passes-droits et les copinages et garantit l’égalité de traitement entre les dossiers. Avec l’article 10 du projet de loi « Transformation de la Fonction Publique », aussi appelé « loi Dussopt », cela ne concernera plus que les dossiers « litigieux », ceux pour lesquels le personnel concerné en fera la demande... Le ministère a d’ailleurs anticipé cette suppression cette année, en communiquant les projets de mouvement avant même la tenue des CAPN, au risque de grosses déceptions et de multiples erreurs.

Mais comment faire pour rédiger un recours dans un dossier litigieux si l’on a pas d’élu-es en commission pour nous informer dudit litige ? Comment savoir que l’on a été lésé-e, que l’on est victime d’une inégalité de traitement ?

L’essentiel à retenir

Ce qui pose problème :

- La non application de la même règle pour tous provoque une inégalité de traitement entre les fonctionnaires qui viole les principes de la Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. On ne peut argumenter comme l’administration en affirmant que « chef d’établissement est un métier difficile » par exemple. De nombreux collègues ont des conjoints qui exercent également des métiers difficiles : pilote de ligne, restaurateur, enseignant, agriculteur… On ne peut favoriser les uns uniquement parce que leur conjoint travaille dans la hiérarchie de l’Éducation Nationale. D’autant que la majorité de ces collègues formulent des vœux restrictifs au mouvement… Pourquoi prendre des risques en formulant des vœux larges quand on sait que dans le pire des cas on sera nommé à titre provisoire près de chez soi ?
- De nombreux collègues ne demandent pas de révision d’affectation car ils savent ne pas entrer dans le dispositif. Ils vont alors faire tant bien que mal les trajets, louer un logement, être éloignés de leur famille… C’est injuste, ceux qui respectent le cadre réglementaire sont moins bien traités ! La règle doit être la même pour tous !
- Les personnels qui bénéficient de révisions d’affectation hors cadre réglementaire sont affectés sur des BMP. Ces BMP sont donc retirés aux TZR qui auraient pu les obtenir au barème et qui se retrouvent souvent affectés sur des postes moins intéressants.

Ce que l’on peut faire pour le mouvement 2020 :

- Être très attentif au suivi de votre demande de mutation en 2020, vous rapprocher de SUD éducation en cas de doute sur la régularité de votre affectation.
- Après examen de votre situation, SUD éducation s’engage à vous soutenir si vos droits n’ont pas été respectés. Nous accompagnerons tous les personnels lésés en les aidant à déposer un recours au Tribunal Administratif.
- SUD Éducation s’engage à informer les collègues et à mettre sur la place publique les petits arrangements du Rectorat.

Mutations INTRA 2019, arrangements et passe-droits : « L’amour est dans la mut’ »

Navigation

Articles de la rubrique