Acte II de l’École inclusive : vers la dé-spécialisation ?

jeudi 19 octobre 2023
par  Sud éduc 34

Communiqué de SUD éducation 34
Jeudi 19 octobre 2023

Le 28 septembre 2023 se tenait au Rectorat la 3ème réunion du groupe de travail autour des PIAL, animé par GuillauMe Lafitte, inspecteur-conseiller technique école inclusive auprès de Madame la Rectrice. Ce groupe de travail regroupe des personnels administratifs du pôle inclusif, des conseillères pédagogiques, des chefs d’établissements, des représentantes de la DAFPEN (désormais EAFC), des AESH référentes, des représentant.es syndicaux FSU, UNSA, FO, SNALC et SUD éducation. Ce groupe de travail entre dans un projet, démarré il y a 3 ans et qui arrive à son terme, dont l’ambition était de structurer un réseau académique autour de l’inclusion en s’appuyant sur des cercles d’études et des groupes de travail pour transformer les formations et produire des guides.

Acte II de l’école inclusive

L’inspecteur-conseiller technique est revenu dans un premier temps sur la 6ème conférence du handicap qui s’est tenue le 26 avril 2023 à l’Elysée et les 12 mesures gouvernementales annonçant "l’acte II de l’école inclusive".

SUD éducation salue certaines mesures qui vont dans le sens d’une plus grande égalité entre élèves et un meilleur accès aux outils de compensation comme :

- l’attribution d’un numéro INE (identifiant national élève) y compris aux élèves en situation de handicap inscrits dans des établissements spécialisés, pour leur permettre notamment une meilleure accessibilité aux examens.
- la distribution de matériel adapté dans les écoles et établissements sans avoir besoin de notifications.

D’autres mesures nous semblent aller sur le papier dans la bonne direction pour une meilleure inclusion dans l’école et la société, mais nous font craindre un effet d’annonce qui cache une diminution des moyens alloués au handicap. La diminution de personnels du secteur médico-social depuis de nombreuses années nous conforte dans nos inquiétudes.

Ces annonces ne sont en outre pas accompagnées de textes qui cadrent la manière dont va s’articuler le lien Education nationale / secteur médico-social. Va-t-on assister à un saupoudrage de moyens pour remplacer des établissements qui - s’ils ont leurs limites et maintiennent les élèves en situation de handicap à la marge - leur offrent un cadre pluridisciplinaire et un parcours individualisé ?

C’est ainsi que le gouvernement veut favoriser :

- l’intervention des professionnels de santé dans les murs de l’école, le développement d’Équipe Mobile d’Appui médico-social à la Scolarisation des enfants en situation de handicap (EMAS) supplémentaires et le déploiement de 100 instituts médico-éducatifs (IME).
- les PIAL deviendraient des PAS, pôles d’appui à la scolarisation. Les enseignant.es référent.es, pourtant déjà bien occupé.es, viendraient en renfort des équipes sur le plan pédagogique. SUD éducation s’est opposé à la mise en place des PIAL, parce qu’ils apparaissaient et se sont révélés bien vite comme une mutualisation de moyens humains qui a automatiquement conduit à diminuer le temps et la qualité d’accompagnement pour chaque élève. Les PAS, si les moyens ne sont pas à la hauteur des ambitions affichées, risquent eux de faire perdre des moyens médico-éducatifs et un suivi personnalisé.
- un plan de formation des équipes, avec le risque qu’il soit le prétexte à déspécialiser l’accompagnement des élèves en situation de handicap en créant de nouvelles missions aux personnels par le biais du Pacte. Ces missions se dilueraient dans toutes les charges déjà assumées.

Certaines mesures relèvent en effet de la déspécialisation. Si SUD éducation partage le constat que l’inclusion doit être l’affaire de tous les personnels, il n’en reste pas moins que l’accompagnement des élèves en situation de handicap nécessite aussi un accompagnement spécialisé, des gestes professionnels spécifiques, des espaces, moments, dispositifs dédiés pour offrir du temps et de la sécurité à des élèves qui en ont particulièrement besoin. C’est ainsi que :

- le gouvernement poursuit le démantèlement de la Maison de l’Autonomie (MDA, anciennement MDPH) au profit de l’EN, qui assumerait la responsabilité de réponse de premier niveau.
- il met en place un nouveau dispositif, le DAR, dispositif d’autorégulation, adressé aux élèves porteurs de troubles du neuro-développement, présenté comme un "sas émotionnel", coordonné par un enseignant non-spécialisé.
- il veut déspécialiser les Sessad sauf pour les Sessad spécialisés dans les troubles sensitifs et moteurs, comme si les troubles du neuro-développement ne nécessitaient pas une formation et un savoir-faire particulier tout autant que les troubles sensoriels et moteurs.
- il veut créer un statut mixte AESH/AED sous l’intitulé ARE (agent à la réussite éducative) qui ressemble bien à un retour en arrière, avec une fusion / confusion entre les missions de vie scolaire et les missions d’accompagnement des élèves en situation de handicap qui ne nécessitent pas du tout les mêmes compétences.

Le prétexte serait d’offrir un temps plein aux AESH. N’importe quel personnel de l’EN sait pourtant combien l’accompagnement d’un.e élève en situation de handicap est exigeant sur le plan humain et demande de la préparation. SUD éducation revendique un temps plein à 24 heures pour les AESH et un statut de fonctionnaire. Sans ce statut l’école ne sera jamais inclusive.

Quelques chiffres académiques présentés par l’administration

Cercle d’étude académique sur les élèves à comportements perturbés

Un 2ème temps a été consacré à la présentation du Cercle d’étude académique sur les élèves à comportements perturbés.

Les syndicats ont fait part des nombreuses remontées de terrain qui mettent à mal l’inclusion des élèves avec autisme ou troubles du comportement en l’absence d’un appui médico-social solide. Les élèves sont insécurisés et progressent peu. Ces situations créent des problèmes de gestion de classe - souvent surchargée -, un sentiment d’impuissance et de la souffrance au travail, voire un sentiment d’insécurité quand les troubles sont associés à des gestes violents. Peu de réponses administratives sont apportées à ces situations.

La conseillère pédagogique en charge de ce cercle d’étude en a présenté les 5 grandes parties :

- Adaptation du cadre / Gestes professionnels
- Observation de l’élève
- Réponse en termes de protocole. Sachant qu’une grande disparité en termes de dispositifs existe dans l’Académie
- Gestion de la crise
- Accompagnement du retour vers le collectif

L’ojectif étant la création de ressources pratico-pratiques d’ici la fin de l’année.

SUD éducation a mis l’accent sur la nécessité de créer un protocole d’accueil des élèves concernés en amont pour éviter au maximum ces situations de crise pour les enfants et pour les personnels.

Outils pour les AESH

Le dernier volet de la journée a consisté à avancer sur la création des outils permettant d’améliorer le parcours professionnel des AESH, et qui devaient être présentés à Madame la Rectrice à la prochaine réunion du pôle inclusif :

La formation iniale des néo-AESH

L’administration a expliqué qu’il s’agit de refondre la formation d’adaptation à l’emploi. Les marchés avec l’IRTS et les CEMEA ont pris fin l’an passé. Ce qui aurait donné l’occasion de transformer cette formation initiale et de revoir son contenu...

Le premier temps sera un temps d’accueil consacré aux informations nécessaires à la prise de poste. Cette journée sera défrayée. Les 1ères journées d’accueil vont avoir lieu dans l’Aude durant le mois d’octobre. Puis dans les autres départements. La formation initiale sera complété par 3 autres journées de formation toujours menées par l’IRTS et les CEMEA. Il ne s’agira plus de recevoir une formation aux troubles, mais plutôt aux besoins. Cette formation sera entièrement en présentiel, délivrée par bassins à l’intérieur de groupes d’une vingtaine de personnes. L’accent sera mis sur les analyses de pratique. Les 3 journées seront espacées, les dates connues à l’avance, sur les mercredis (sic). Une nouvelle application liée à la formation, Sofia, est en train d’être déployée dans toutes les académies.

SUD éducation regrette que la proposition syndicale d’un temps d’observation à la rentrée pour les nouveaux/elles AESH n’ait pas été retenue. SUD éducation regrette également que des représentations sur les AESH perdurent dans l’élaboration de ces formations : interdiction de communiquer avec les parents sans l’égide d’un enseignant / non accès au livret de parcours inclusif des élèves (LPI).

A noter : les syndicats ont fait remonter la difficulté à s’inscrire aux formations MIN (module d’initiative nationale). Une circulaire académique parait chaque année précisant les modalités d’inscription. Il faut donc demander aux coordinateurs/trices de PIAL de la transmettre. Attention, par rapport aux critères d’éligibilité, l’AESH doit avoir en amont suivi une formation DAFPEN (EAFC) équivalente pour prétendre à une formation MIN.

Le mémento d’accueil
Il s’agira d’un document en format A3 pliable, qui sera complété par le pilote de PIAL, puis transmis à l’ensemble des AESH par l’intermédiaire du coordinateur/trice de PIAL.
Le problème de la pluralité d’adresses mails académiques (en fonction du nombre de contrats) a été soulevé par l’ensemble du GT. Une recherche de solution va être demandée au service informatique. Les AESH dans cette situation ne doivent pas hésiter à contacter le service informatique.

SUD éducation a demandé un ajout sur les conditions de remboursements des déplacements ainsi que sur la procédure.

L’enquête sur les conditions d’emploi des AESH
En 2021 une enquête précédente adressée aux AESH sur leurs conditions d’emploi avait reçu 1 000 réponses. Mais certains départements n’avaient pas été touchés.
Une nouvelle enquête en 2 temps (premier envoi en octobre / 2ème envoi en février) sera composée de 70 questions.

SUD éducation invite les personnel AESH à s’emparer largement de cette enquête pour pointer leurs difficultés d’exercice et dénoncer leurs conditions de travail.

Acte II de l’École inclusive : vers la dé-spécialisation ?