Déclaration de Sud éducation Languedoc-Roussillon à la CAPA Recours PPCR des certifié-e-s

jeudi 31 janvier 2019
par  Sud éduc 34

Mesdames, Messieurs, membres de cette CAPA,

L’ordre du jour de cette CAPA traite de l’examen des recours suite aux rendez-vous de carrière : les revendications de SUD éducation L-R sur ce sujet sont toujours les mêmes et l’étude des dossiers des collègues vient confirmer notre opposition ferme à cette réforme de l’évaluation des enseignant-es, via le protocole PPCR.

Le rendez vous de carrière s’inscrit dans la continuité des réformes des missions et des obligations réglementaires de service des enseignante-s du premier et du second degrés (entre autres), qui imposent toujours plus detâches et de missions sans réduction du temps d’enseignement.

Cette dérive productiviste montre-t-elle que les clichés les plus éculés sur le travail des enseignant·e·s ont contaminé la hiérarchie ? Quoi qu’il en soit, difficile de ne pas y voir une volonté de museler les enseignant·e·s, en les assujettissant à un mode de management destiné les faire taire. SUD éducation L-R observe que le passage au PPCR n’a pas atténué la pression sur les personnels. Bien au contraire, le management public actuel augmente encore le niveau de stress des collègues.

Une évaluation arbitraire !

Cette nouvelle évaluation est encore plus opaque que l’ancienne. Sans grille de référence selon l’échelon, les possibilités de recours en CAP (Commission administrative paritaire) sont réduites et l’arbitraire encore plus grand. La raison : le nombre de méritant·e·s est déjà fixé à l’avance par un quota. Les critères d’évaluation sont déterminés préalablement par l’administration pour remplir ce quota imposé par décret. L’avis du supérieur hiérarchique n’ayant pas besoin d’être motivé, il peut tout à fait choisir de mettre seulement 30% d’avis « excellent », par exemple pour les passages accélérés au 7ème et 9ème échelons, puisque le quota de promus sera de 30 %. On peut également s’interroger sur l’harmonisation des promu·e·s. Si 30% des personnels au 8ème échelon doivent passer au 9ème échelon au bout de deux ans, comment se fait cette répartition entre les différents corps et les différentes disciplines ?

En conséquence, il faut bien « choisir » les plus « méritant-e-s ». Le critère décisif n’est pas le nombre d’items excellents dans son champ professionnel, il se situe au-delà de l’enseignement stricto sensu : être formateur, faire de l’animation de bassin, être référent·e ou assumer d’autres tâches qu’enseigner. C’est un moyen de pousser les personnes à faire des tâches annexes, chronophages et lourdes, sans décharge de service ni indemnités. Aux yeux de l’institution, ce bénévolat mérite bien une carrière accélérée ! On valorise la soumission à des politiques éducatives non discutées plutôt que la qualité du service public d’enseignement.

Une évaluation inégalitaire !

Avec ce système, on peut s’attendre à ce que les femmes soient à nouveau pénalisées, puisqu’elles prennent plus que les hommes des congés parentaux. Outre que la mise en place de la classe exceptionnelle, réservée à seulement 10% des enseignant·e·s, augmente l’écart de rémunération maximal en fin de carrière, ce nouveau grade renforce les inégalités salariales entre les hommes et les femmes. Alors que les femmes sont sur-représentées dans l’enseignement, lorsqu’il s’agit de la classe exceptionnelle cette féminisation disparaît. Les enseignantes seraient-elles moins méritantes, moins investies que leurs homologues masculins ?

Par ailleurs, si une personne manque le rendezvous de carrière (arrêt-maladie ou congé maternité), il n’y a pas de possibilité officielle de rattrapage. Dans ces conditions, quand l’administration se donnera t-elle les moyens de réduire vraiment les inégalités qui touchent les collègues ayant des carrières hachées, notamment les femmes ? Ce n’est pas le dispositif proposé aux personnels concernés par le rectorat qui le permettra.

Des critères d’évaluation opaques !

Au final, c’est la même logique que le système de notation précédent, mais en plus injuste, inégalitaire et plus opaque. La grille nationale d’évaluation définit onze compétences, dont six ne sont pas en lien avec l’enseignement d’une discipline. Les IPR et les chefs d’établissement vont évaluer des compétences comme la « coopération au sein d’une équipe », la « contribution à l’action de la communauté éducative », le fait d’agir « en éducateur responsable et selon des principes éthiques » ou de « s’engager dans une démarche individuelle et collective de développement professionnel »… Ces compétences relèvent de dimensions comportementales et relationnelles et dépendent du contexte. Notre travail d’élu·e·s paritaires en est d’autant plus complexe. De plus, ce système crée de la concurrence et des ambiances de travail délétères entre les personnels qui se demandent pourquoi untelunetelle est plus « méritant·e » que tel·le autre.

L’accès à la classe exceptionnelle va dans le même sens en divisant les personnels qui se sentent tous aussi exceptionnels que les promu·e·s ! En définitive, cela laisse le pouvoir au chef de service (IEN, chef d’établissement…) de décider de qui a une promotion… ou pas, renforçant ainsi les logiques clientélistes.

En plus des trois rendez-vous de carrière, l’enseignant-e peut être soumis-e à des « entretiens conduits à intervalles réguliers » par le/la chef·fe d’établissement. Les personnels sont donc invités à rendre des comptes et à se « vendre » en permanence. Les récalcitrant·e·s peuvent se voir imposer une mise sous tutelle (« accompagnement ») individuelle ou collective (toute une équipe disciplinaire par exemple) dont le but peut être « l’explicitation des réformes la conception et la mise en oeuvre de projets ou de dispositifs pédagogiques sur l’évolution des pratiques pédagogiques… »

Les IPR gardent aussi la possibilité de continuer à faire des inspections (que certain-e-s préfèrent nommer « visite conseil ») qui ne peuvent pas déboucher sur une évaluation mais dont le rapport peut être utilisé pour justifier un « accompagnement » ou toute procédure disciplinaire.

SUD éducation revendique l’égalité salariale et des augmentations générales des salaires, une évaluation coopérative et purement formative déconnectée de l’évolution des rémunérations. Plutôt qu’une mise en concurrence des collègues, une réduction du temps de service permettrait concertation et échanges pédagogiques.

Déclaration de Sud éducation Languedoc-Roussillon à la CAPA Recours PPCR des certifié-e-s