Déclaration au Conseil Supérieur de l’Education du 22 septembre 2016

mardi 27 septembre 2016
par  Sud éduc 34

Conseil Supérieur de l’Éducation Séance du 22 septembre 2016

Cette année scolaire débute dans un climat politique délétère de surenchère sécuritaire et sectaire qui assimile une partie de la population au terrorisme sous couvert de prétendus débats sur la laïcité. Nous condamnons une fois de plus sans détour les attentats, leurs instigateur/trices et celles et ceux qui les revendiquent.

Nous sommes particulièrement inquiet-es du traitement actuel de ces questions par celles et ceux qui nous gouvernent ou aspirent à le faire. Il participe au développement des comportements xénophobes et racistes dans la population, tout cela favorisé par certains traitements médiatiques indignes où dominent amalgames, approximations et sensationnalisme.

Nous devons combattre toutes les ségrégations, toute stigmatisation des personnes cataloguées « musulmanes » et la façon dont sont aujourd’hui traité‑e‑s les migrant-e-s, à qui on refuse les droits les plus élémentaires y compris pour les enfants, celui à la scolarisation obligatoire avec des refus d’inscription d’enfants roms par les maires de certaines communes et ce en toute impunité.

L’empathie que nous avons pour les victimes des attentats, où qu’elles soient, et notre opposition résolue au développement des idéologies mortifères ne nous empêchent pas de mettre en cause les politiques mises en œuvre à l’intérieur et à l’extérieur des frontières de la France.

C’est pourquoi, nous condamnons la prolongation de l’état d’urgence votée cet été, qui comme le dit le collectif « Nous ne céderons pas », s’inscrit dans la logique d’un « état d’urgence sans fin, aggravée par des dispositions qui accroissent encore les possibilités d’arbitraire ou qui valident des mesures sans rapport avec l’objet du texte.

Ainsi, les perquisitions administratives vont reprendre et même les enfants deviennent des suspects potentiels puisqu’ils pourront être retenus pendant quatre heures au cours d’une perquisition ». C’est dans ce contexte qu’ont été publiées les instructions relatives aux mesures de sécurité dans les écoles et les établissements scolaires à la rentrée scolaire 2016.

Et de fait, à la rentrée, l’essentiel de la communication ministérielle a été orientée sur les questions sécuritaires, avec des mesures que nous jugeons inefficaces, anxiogènes, parfois dangereuses pour les libertés publiques.

Elles sont également très coûteuses et permettent avant tout d’engraisser le patronat des entreprises de la sécurité et des outils du contrôle des populations.

Avec en prime, des décisions qui révèlent le cynisme sans limite de ce gouvernement puisqu’il vient de décider de prendre 30 millions du fond destiné aux personnes en situation de handicap dans les universités pour financer les mesures sécuritaires.

Ces mesures aggravent la charge de travail des personnels quand elles ne débordent pas totalement le cadre de leurs missions, les personnels de l’éducation nationale n’ayant pas vocation à devenir des agent-es de sécurité.

L’embrigadement de l’école, des enseignant-e-s, de l’ensemble des personnels dans cette logique sécuritaire va encore fragiliser l’école publique en rendant son rôle de plus en plus confus.

Nous ne voulons pas enseigner la peur, nous ne voulons pas devenir les vigiles anti-terroristes d’une école bunkérisée.

Ces mesures qui s’inscrivent dans la même logique que l’état d’urgence permanent passent à la trappe les réels problèmes de l’école et le mécontentement des personnels.

Ces mesures permettent d’occulter des conditions de rentrée que nous ne trouvons pas meilleures que les années précédentes : sureffectifs dans les classes notamment au lycée, manque de postes et de moyens qui se solde par un recours massif aux personnels enseignant-es contractuel-les qui tend à présent à se généraliser dans le premier degré, n’engendrant que précarité et inégalités entre les titulaires et les non-titulaires et dégradant les conditions de travail pour toutes et tous.

Les élèves et les personnels commencent à subir la réforme du collège. Une réforme imposée contre l’avis des personnels qui en accroissant l’autonomie des établissements aggravent les inégalités entre les collèges avec la modulation locale des horaires des disciplines, les choix des EPI, choix d’utilisation de la marge-professeur qui peut servir à prodiguer des enseignements disparus tels que le latin dans certains collèges de CSP favorisées...

La mise en place des nouveaux programmes n’est guère plus satisfaisante. Les formations se font attendre, les moyens sont absents, et une fois de plus cette réforme permet d’imposer aux enseignant-es des modalités de fonctionnement autoritaires, pyramidales et chronophages, notamment dans le cycle 3 commun à l’école et au collège, modalités qui ne favoriseront en rien une réelle liaison entre les enseignant-es des écoles et des collèges et ne profiteront ni au progrès des élèves ni aux conditions de travail et de concertation des personnels.

La réforme des rythmes scolaires dont nous continuons de revendiquer l’abrogation est toujours remise en cause par les enseignant-es mais également par les animateur/trice-s du périscolaire.

La preuve est faite que ces rythmes détériorent les conditions de travail des personnels et ne sont en rien favorables aux apprentissages des élèves qu’ils ne permettent pas d’améliorer, alors que c’est cet objectif principal qu’ils avaient la prétention de poursuivre.

Elle augmente dans le périscolaire les taux d’encadrement pour les enfants au détriment de leur sécurité et de conditions d’exercice des personnels d’animation.
Le démantèlement de l’éducation prioritaire se poursuit. Les lycées des ex zones d’éducation prioritaire sont à de nouveau mobilisés pour demander leur maintien dans le dispositif d’éducation prioritaire avec les mesures et les moyens qui y sont rattachés.

Nous soutenons leurs revendications bien que nous soyons très critiques face au dispositif REP qui, a contrario des effets d’annonce institutionnels, ne s’accompagne d’aucune baisse d’effectifs ; celui-ci se fait à moyens constants, et les pondérations débouchent sur des concertations dont les horaires et le contenu sont souvent imposés aux collègues par la hiérarchie. Pour nous cela n’a rien d’une véritable réforme de l’éducation prioritaire.

Dans l’enseignement professionnel les parcours mixés et des publics mixtes se développent et s’intensifient au détriment de la voie sous statut scolaire.
La liste des nouvelles mesures pour « réussir l’entrée au lycée professionnel » outre qu’elle entérine des mesures déjà existantes donne aux élèves et aux parents une illusion de souplesse et d’ouverture alors que le nombre de places limité dans des filières attractives permettra peu de ré-orientations mais engendrera en revanche beaucoup de frustration.

Elle dessine un accroissement notable de la charge de travail des enseignant-es dans des missions diverses et variées, irréalisables à moins d’augmenter le nombre d’enseignant-e-s ; ce qui n’est, semble-t-il, pas à l’ordre du jour.

Enfin, dans quelques semaines, ils et elles pourront apprécier à sa juste valeur, la réforme annoncée de l’évaluation des enseignant-e-s, prochain coup de butoir dans l’atteinte à la liberté pédagogique et à l’autonomie des enseignant-es, et promet une soumission à la hiérarchie encore accrue et une rémunération au mérite qui favorisera la concurrence entre les personnels et individualisera encore davantage les parcours.

En cela cette réforme s’inscrit dans la droite ligne de la loi travail promulguée à grands coups de 49-3… et de matraques : dans la logique de toujours plus d’arbitraire patronal, de destruction des droits et garanties collectives, de précarité et de chômage, d’inégalités.

Nous continuons à revendiquer l’abrogation de cette loi, malgré sa promulgation, comme nous l’avions fait pour le CPE. Nous continuerons à nous mobiliser contre la loi travail et son monde pour protéger les droits des salarié-e-s partout et après des décennies de régressions sociales pour stopper les attaques contre nos droits, mais aussi nous battre pour le progrès social, pour une autre école, une autre société.

Déclaration Sud/Solidaires CSE du 22 septembre 2016